Un membre permanent de la famille est un très beau recueil de douze nouvelles sur la middle class américaine, l’Amérique des délaissés, celle des hommes et des femmes seuls, qui se débattent pour acheter une voiture, accepter une rupture, un décès, maintenir à flot une famille, vivre avec les autres et avec soi.
L’ambiance de l’Amérique de Russell Banks est assez sombre et grisâtre, même s’il l’a ponctue d’accents de cynisme, voire d’humour, il réussit à donner à ces nouvelles une grande cohésion et beaucoup de réalisme. Les personnages dont on se sent très proches sont assez seuls et désillusionnés, les regards sont assez vides, les discussions assez vaines, la vie est ainsi et elle suit son cours. Il s’en dégage une mélancolie désappointée, qui est d’autant plus marquante qu’elle est portée par une écriture très belle et très fluide.
Toutes les nouvelles ne sont pas touchantes de la même manière. J’ai particulièrement aimé les deux premières, Ancien Marine, l’histoire d’un vieil homme désormais seul, qui va dépasser la frontière de l’honneur et de la gloire pour ses deux enfants et Fête de Noël, où la tension ressentie par Harold, que sa femme a quitté pour aller vivre avec un autre, est transmise au lecteur à chaque phrase, à chaque mot.
Deux autres nouvelles m’ont beaucoup remuée, mais de manière totalement différente. « Transplantation » m’a fait monter les larmes aux yeux. Une jeune femme se souvient de l’être aimé disparu, en écoutant les battements de son coeur transplanté dans le corps d’un autre. Les émotions ressenties dans « Blue », sont tout aussi fortes. Cette nouvelle m’a surprise, tenue en haleine et donné la chair de poule. Je n’en dirais pas plus, pour que sa découverte soit totale. Un point commun dans ce recueil, même si j’ai largement préféré ces quatre nouvelles aux autres, les chutes de chaque histoire ont l’originalité d’être souvent brutales et subtiles en même temps.
Les avis de Ariane, Clara, Kathel, Jérôme, Eva, Jostein et Philisine.
Les premières lignes :
(ou lire un extrait plus long)
Après être resté éveillé une heure dans son lit, Connie finit par repousser les couvertures et se lever. Il fait encore nuit. Pieds nus, il frisonne dans son boxer et son tee-shirt. Il ressent une légère gueule de bois – une bière de trop la veille, au 20 Main.
La 4e de couverture des éditions Actes Sud :
Un mari humilié qui rôde dans la maison de son exfemme, un serveur déprimé qui invente à une inconnue une vie qui n’est pas la sienne pour la sauver d’un hypothétique désespoir, des hommes et des femmes qui, pour transcender leur existence ordinaire, mentent ou affabulent à l’envi, sous le soleil de Miami ou sous des cieux plus sombres…
Dans ces douze nouvelles d’une extraordinaire intensité et peuplées de personnages cheminant sur le fil du rasoir, Russell Banks, convoquant les angoisses et les tensions où s’abîment les fragiles relations que l’être humain tente d’entretenir avec ses semblables, transmue magistralement le réel et le quotidien en authentiques paraboles métaphysiques.
Russell BANKS
Un membre permanent de la famille
Traduit de l’américain par Pierre Furlan
Actes Sud, Janvier 2015, 240 pages
j’ai un gros pavé dans ma PAL de cet auteur que je n’ai toujours pas touché… il serait temps!
C’est vrai qu’il en a écrit un certain nombre quand même de livres. Un jour ! 😉
J’ai beaucoup aimé ce recueil qui m’a permis de renouer avec plaisir avec Banks que je n’avais pas lu depuis longtemps.
Mon dernier Russell Banks était Sous le règne de Bone, et ça fait longtemps. Je vais en lire un autre bientôt je pense.
Bonsoir Laure, de ce recueil, mes deux préférés sont la nouvelle qui donne son titre au roman, je craque pour les chiens. Et Blue qui est une histoire horrifique digne de Stephen King. Bonne soirée.
Merci Dasola, j’ai bien aimé également Un membre permanent de la famille, même si j’ai souvent un peu peur des chiens, et oui, Blue, c’est exactement ça, une histoire horrifique à la Stephen King, glaçant.
Il fait partie de ces livres que j’ai envie de découvrir rien que pour la couverture 🙂
Anne-Sophie, je suis ravie de lire que toi aussi tu choisis des livres en fonction de leur couverture 🙂
Je ne crois pas qu’un recueil de nouvelles m’ait autant emballée depuis celui-ci… Du grand art !
Je dois dire que dans la catégorie recueil de nouvelles américaines, j’ai adoré Incandescences de Ron Rash.
C’est un très bon recueil de nouvelles. Il est vraiment de haute qualité littéraire. Bises
Ca faisait longtemps que je n’avais pas lu Russell Banks, et grâce à ce recueil, je vais relire un roman de lui, la qualité littéraire devrait se retrouver aussi dans ses romans.
Transplantation est ma préférée ! C’est un recueil magnifique qui m’a rappelé pourquoi j’aime autant les nouvelles.
Transplantation est d’une efficacité absolument désarmante.
Je me suis régalée aussi avec ce recueil de nouvelles, je n’avais jamais rien lu de l’auteur mais ça m’a donné envie de lire ses romans ! et je plussoie pour « Blue » !!
C’est clair que « Blue » est une excellente nouvelle !
Je ne suis pas du tout nouvelles mais celui-ci me tente depuis sa sortie. Ton billet confirme merci.
Elles sont très bien construites, et même si tu ne les apprécies pas toutes de la même manière, je suis certaine que tu vas en adorer certaines.
Je n’ai lu qu’un roman de Russell Banks et j’en étais ressortie mitigée. Et je n’ai jamais réessayé et pourtant ce que tu en dis me plait énormément. Il faudrait vraiment que je lui laisse une nouvelle chance.
Pour lui laisser une nouvelle chance, découvrir plusieurs nouvelles est un bon moyen 😉
Il est dans ma PAL et je pense qu’il me plaira ^^
Je le pense aussi et l’espère !