Novembre 1989. Une femme, une mère, apprend qu’elle a un cancer de l’estomac. Habitant en Norvège depuis quarante ans, elle décide de partir, de rentrer chez elle dans sa ville natale au Danemark. Elle embarque sur le Holger Danske.
L’un de ses fils, Arvid, qui apprend son départ une fois qu’il a déjà eu lieu, décide de la rejoindre. Il retrouvera sa mère dans le chalet qu’elle a rejoint, lieu de sa jeunesse, lieu de ses souvenirs et de ses douleurs.
Alors que l’histoire prête à l’introspection, à la découverte de l’intime, des relations entre la mère et le fils, des liens entre une famille, au retour vers le passé, à la nostalgie, la mélancolie, en tout cas, à faire vivre des émotions, ce roman m’a laissée de marbre.
Le fait que le narrateur soit le fils Arvid, et non la mère, explique peut-être en partie cette impression, mais pas uniquement. La construction des chapitres moments présents et souvenirs passés, bien que classiques, permettaient pourtant bien aux faits et aux émotions de se répondre, au passé de faire écho sur le présent, mais cela ne fonctionne pas vraiment. En plus, les personnages ne m’ont pas paru très sympathique, je n’ai pas éprouvé beaucoup d’empathie, alors que c’est le genre de sujet qui a tendance à faire vibrer mes cordes sensibles assez facilement.
C’est comme si la distance et la froideur qui régit le lien mère fils était tellement bien retranscrite, qu’elle transpirait à travers les lignes, jusqu’à atteindre le lecteur. C’est donc un livre qui au final m’a semblé assez froid et plutôt sans âme, en dépit de son sujet.
Ma déception résulte également du fait que Maudit soit le fleuve du temps est un livre qui m’attendait depuis longtemps, et j’étais persuadée qu’il serait magistral et totalement bouleversant, gardant en tête des avis très positifs. A la fin de ma lecture, je me suis demandée si je n’avais pas confondu avec un autre titre du même auteur.
Alors, comme l’écriture m’a plu, et que Per Petterson est à mon avis capable de faire mieux, je me laisserais peut-être tenter par Pas facile de voler les chevaux ou Je refuse.
Les premières lignes :
(ou lire un extrait plus long)
Ces événements se sont déroulés il y a plusieurs années. Depuis un moment, ma mère n’allait pas bien. Pour couper courts aux litanies de ceux qui s’inquiétaient pour elle, mes frères surtout, mais aussi mon père, elle se décida enfin à consulter le médecin qui soignait toute notre famille depuis la nuit des temps.
La présentation des éditions Gallimard :
Arvid, le narrateur de Maudit soit le fleuve du temps, décide de rejoindre sa mère. Cette dernière, prenant de court toute sa famille, a sauté sur le premier ferry depuis Oslo après avoir appris qu’elle souffrait d’un cancer, pour se réfugier dans la petite maison qu’elle possède dans le nord du Danemark dont elle est originaire. Elle accepte d’abord de mauvaise grâce la présence de ce fils mal dans sa peau, puis, dans un face-à-face inédit pour l’un et l’autre, la communication s’établit. Petit à petit, des événements du passé refont surface… Arvid revient sur l’échec de son mariage, son enfance dans un quartier ouvrier d’Oslo, son engagement militant et sa décision de ne pas faire d’études et de travailler dans une usine. La mère, quant à elle, veut retourner une dernière fois sur l’île de Læsø où elle avait été accueillie à un moment difficile de sa vie, révélant par la même occasion à son fils tout un pan de son existence.
Le balancement entre passé et présent rythme ce récit pudique et émouvant, et on retrouve ici tout l’art de Petterson de parler sans pathos des petites et grandes déchirures qui traversent nos vies. Sur une thématique très différente, on retrouve les qualités d’écriture qui ont fait le succès de Pas facile de voler des chevaux.
Per PETTERSON
Maudit soit le fleuve du temps
Traduit du norvégien par Terje Sinding
Gallimard, septembre 2010, 240 pages.
Folio n° 5367, février 2012, 288 pages.
VO : 2008, Jeg forbanner tidens elv
Je suis plus tentée par un autre de ses romans – et ton billet confirme mon instinct
Je le dis souvent, il faut suivre son instinct !
Je trouve que tu lui mets tout de même une note pas si mauvaise pour un livre qui ne t’a pas touchée et qui t’a déçue.
Je ne l’ai quand même aimé un peu, j’ai aimé le sujet choisi et l’écriture, mais je m’attendais en effet à être plus touchée vu le thème. J’ai souvent tendance à plus détailler les points négatifs que positifs, tu as raison 😉
J’ai beaucoup aimé Pas facile de voler les chevaux et Je refuse. Oh oui, relis-le, c’est un auteur intéressant !
Je n’y manquerai pour rien au monde, et j’espère bien, sans attendre le prochain mois de décembre !
J’ai adoré « Je refuse », c’est un auteur que je veux retrouver un jour, mais peut-être pas avec ce roman-là^^
J’adore constater que selon les uns ou les autres, c’est plus « je refuse » d’un côté ou « pas facile de voler les chevaux » de l’autre.
J’avais vraiment adoré « Pas facile de voler les chevaux » aussi ai-je été un peu déçue par les deux que j’ai lus après (« Maudit soit… » et « Je refuse »). Ce ne sont pas de « mauvais » romans, mais il n’ont pas le souffle du premier.
Après vérification, j’avais un doute, c’est bien « Pas facile de voler les chevaux » que j’ai sur une étagère, ça tombe sacrément bien alors !
« Je refuse » m’attend sur mes étagères, je vais plutôt commencer par là…
Décidément, je n’ai pas choisi le bon pour commencer, mais je ne crois pas que j’ai « je refuse » sur les étagères, il faut que je vérifie, mais j’en ai un autre, c’est certain.